Faux sermon pour un vrai mariage :
DANIEL & PIERRE, 22 JUIN 2024
Texte d' Anne CAUMES
Sur l'idée et les ispirations de Dominique K et des 4 témoins
PERSONNAGES
DANIEL
PIERRE
-
LE PRETRE
CUPIDON
DEUX INVITE·E
DEUX DES TEMOINS
UNE ASSEMBLEE D’INVITES, figurants
_
LE PRÊTRE
Mes bien chers Frères et mes bien chères Sœurs,
Il est certains jours plus solennels que d’autres dans la vie d’un être. Une naissance, le
passage de l’enfance à l’adolescence, celui de l’adolescence à l’âge adulte, puis le dernier
passage vers l’Autre Monde, qui semblent tous écrits par la seule main de Dieu.
Mais l’union de deux êtres est un rite d’une autre teneur, car elle se base sur leur libre
arbitre et l’engagement mutuel de ces deux êtres devant leur communauté.
C’est bien la raison qui nous rassemble ici, dans ce lieu sacré : célébrer l’union de Daniel
et Pierre.
Seigneur Jésus, nous te remercions pour l'Amour que tu as semé dans leurs cœurs et
que Daniel & Pierre s’apprêtent à sceller aujourd'hui en recevant le sacrement du
mariage devant notre assemblée.
(Un Cupidon entre en scène, un peu éméché ? Auréole fracassée et flèche pas droite.)
Aussi, nous te demandons de les guider sur le chemin de la vie conjugale…
CUPIDON
(qui la ramène, désinvolte)
Ah ! la vie conjugale ! Syntaxe, grammaire, tout ça… Mais ils connaissent déjà : Daniel a
écrit un conte et Pierre ne fait que raconter des histoires !
LE PRÊTRE
(qui fait les gros yeux à CUPIDON)
… de les aider à pardonner et à grandir ensemble dans la Foi et l'Amour.
Que leur mariage soit une source de Lumière et d'Espoir pour ceux qui les entourent, et
que leur foyer soit un lieu où règne la Paix et la Joie.
Daniel, Pierre, souhaitez-vous ouvrir, devant ce^e assemblée témoin, la porte du
Bonheur ?
(DANIEL et PIERRE sans doute perplexes, ne savent pas quoi faire.
CUPIDON leur mime l’ouverture d’une porte imaginaire.)
Alors, allez-y !
(DANIEL et PIERRE ouvrent la porte du bonheur.)
Derrière ce^e porte se trouvent votre avenir radieux et quelques souvenirs. Eh oui !
Voilà quelques années, Daniel et Pierre se rencontraient alors qu’ils se faisaient suer
(CUPIDON enclenche un extrait de la musique du film Il Bagno turco - Hamam
Dès lors, leurs points communs n’ont pu que frapper leurs familles et leurs amis : leur
couleur de peau pour commencer…
CUPIDON
(qui la ramène encore, en se penchant sur le papier du PRÊTRE et lisant par-dessus son épaule)
Euh… non, ça, on avait dit qu’on le disait pas…
LE PRÊTRE
(poursuit)
… leur passion commune pour le Cantal…
CUPIDON
Non, non… ça non plus, on avait dit qu’on le disait pas…
LE PRÊTRE
Leur coupe de cheveux ?
(CUPIDON soupire bruyamment. Le PRÊTRE reprend le lead par une pirouePe verbale)
… et surtout, ils se sont bien trouvés dans leurs différences et, donc, dans leur
complémentarité : l’un est médecin, l’autre hypocondriaque ; l’un aime le discours,
l’autre le silence ; l’un apprécie le calme méditamf, l’autre exulte dans l’urgence ; l’un est
plutôt cerf, l’autre tortue…
(LE PRÊTRE envoie un hochement de tête à CUPIDON qui lui répond par un pouce levé.)
Et nous pouvons célébrer leur humanisme, leur goût des voyages et leur ouverture à
l’Autre par la lecture de ce pemt texte de Khalil Gibran :
« Al-Mitra reprit la parole. Elle demanda : Maître, que dire du Mariage?
Il répondit :
Ensemble êtes-vous nés et ensemble resterez-vous pour toujours.
Quand les blanches ailes de la Mort éparpilleront vos jours, vous serez ensemble.
Oui, vous serez ensemble dans la mémoire silencieuse de Dieu.
Mais qu'il y ait des espaces dans votre entente.
Que les vents des cieux puissent danser entre vous.
Aimez-vous, l'un l'autre, mais ne faites pas de l'amour un carcan :
Qu'il soit plutôt mer mouvante entre les rives de vos âmes.
Remplissez, chacun, la coupe de l'autre, mais ne buvez pas à la même.
Donnez-vous l'un à l'autre de votre pain, mais ne partagez pas le même morceau.3
Chantez et dansez ensemble, et soyez joyeux, mais que chacun demeure isolé,
Comme sont isolées les cordes du luth, bien que frémissantes de la même musique.
Donnez vos cœurs, mais pas à la garde de l'autre,
Car vos cœurs, seule la main de Dieu peut les contenir.
Et dressez-vous ensemble, mais pas trop près l'un de l'autre:
Car les piliers du temple se dressent séparément,
Et le chêne et le cyprès ne peuvent croître dans leur ombre mutuelle. »
(PeRt temps solennel de silence et de recueillement.)
LE PRÊTRE
(poursuit)
Chers Frères et Sœurs, demandons maintenant à Dieu de bénir ces futurs nouveaux
époux qui vont recevoir ensemble le corps et le sang de Jésus Christ.
(CUPIDON met son arc et sa flèche tordue sous son bras, s’approche des époux et fait
manger à Daniel et à Pierre un truc surprenant en guise d’hosRe, genre chips au piment ?
et boire un truc tout aussi surprenant auquel ils ne s’aPendent pas )
Et puisqu’ils partagent maintenant avec joie le repas de ton Eucharisme, Père saint,
donne-leur à tous deux la joie d’être un jour tes convives au fesmn du Royaume.
Pour fêter cet instant solennel, j’invite à présent l’assemblée ici réunie à se lever pour
entonner tous ensemble un chant de louange.
(CUPIDON fait jouer un extrait de C’est l’amour à la plage de Niagara)
Les invités chantent et dansent un peu. CUPIDON s’éclate.)
LE PRÊTRE
Vous pouvez vous rasseoir. Nous allons pouvoir passer à l’échange des consentements.
Daniel, Pierre, avant de vous inviter à vous engager pour la vie l’un envers l’autre, je vais
devoir, comme la tradimon l’exige, me tourner vers l’assemblée ici présente. Et si
quelqu’un a quelque raison que ce soit de s’opposer à ce mariage, qu’il parle
maintenant, ou qu’il se taise à tout jamais.
(Il aPend quelques secondes.)
UN·E INVITÉ·E
(sur un ton de ragot, lève la main)
Je ne veux pas jouer les trouble-fête, mais je sais de source sûre que l’un d’eux a déjà
prêté serment.
CUPIDON
(aPerré, regardant les mariés tour à tour dans les yeux)
Quoi ? Non, mais c’est pas vrai ? Lequel des deux m’a fait ça ?
UN·E DES TÉMOINS DE PIERRE
(défendant Pierre)
Il est vrai que l’un des futurs mariés a déjà prêté serment : celui de soigner, d’aider, de
soutenir, d’accompagner, de soulager, même les indigents. Le serment d’Hippocrate est-il
incompamble avec celui du mariage ?
LE PRÊTRE
Mmmh… oui, je vois, je vois…
(CUPIDON s’évente de soulagement, comme après un gros choc émoRonnel.)
D’autres objecmons ?
UN·E AUTRE INVITÉ·E
(lève la main, embarrassé·e)
Ça me tracasse depuis un moment… Voilà… Eh bien moi, j’ai vu, de mes yeux vu, l’un
d’eux, enmèrement nu, dans les ruines d’un vieux moulin à papier, s’adonner à d’étranges
rituels. Il a fini le corps tout recouvert d’argile de la tête aux pieds, avec des bois de cerf
sur la tête, implorant à genoux un certain Albert, comme ça : « Albert ! Oh, Albert ! »
CUPIDON
(furax)
C’est quoi ce^e histoire encore ? Non, mais vous m’aurez tout fait, vous deux !
UN·E DES TÉMOINS DE DANIEL
(défendant Daniel)
Oui, c’est vrai, l’un d’eux est un armste engagé dans l’art végétal. Il soigne lui aussi, à sa
manière, l’âme des gens en provoquant des prises de conscience sur la faune et la flore
qui nous entourent par de magnifiques performances armsmques où il se met en scène
pour toucher le cœur des gens, les sensibiliser au sort de notre Terre. Albert ? L’esprit
d’un vieil ami cervidé vient l’aider parfois à transme^re ses messages. Tu parles d’une
histoire sulfureuse !
LE PRÊTRE
(poursuit)
Quelqu’un d’autre ? Non ? Bon. Je crois que nous voilà tous rassurés.
(CUPIDON se Rent la poitrine, en respirant fort, comme pour éviter une crise cardiaque.)
Passons donc au moment que vous a^endez tous : l’échange des consentements entre
époux. Veuillez tous vous lever pour célébrer cet instant unique.
PIERRE, RAYMOND, HENRI, GUY-BERNARD, BOYER, voulez-vous prendre DANIEL,
GILBERT, MARCEL, JEAN-ROBERT, RUMEAU pour époux, d’apprendre à aimer ses
ronflements, à apprécier ses essais culinaires improbables, à accepter de ne jamais
prendre l’avion à ses côtés, à assumer sa passion étrange pour les bains de boue ? Et
prome^ez-vous de lui rester fidèle, dans le bonheur ou dans les épreuves, dans la santé
et dans la maladie, pour l’aimer tous les jours de votre vie ?
PIERRE
(Normalement !)
Oui, je le veux.
LE PRÊTRE
DANIEL, GILBERT, MARCEL, JEAN-ROBERT, RUMEAU, voulez-vous prendre PIERRE,
RAYMOND, HENRI, GUY-BERNARD, BOYER pour époux, en faisant votre possible pour
vous habituer à son engouement pour les chansons des années 80, en écoutant avec
pamence TOUTES ses narramons, et en tolérant avec bienveillance ses encombrantes
collecmons de carnets et de stylos ? Prome^ez-vous de soutenir sa plume (si je puis5
dire…), même lorsqu’il écrit sur la « Mise en place d'un programme de cliniques mobiles
dans le nord du Sri Lanka à l'occasion d'une mission avec Médecins sans fronmères »
(mtre désormais best-seller à Clermont-Ferrand) ? Et prome^ez-vous de lui rester fidèle,
dans le bonheur ou dans les épreuves, dans la santé et dans la maladie, pour l’aimer tous
les jours de votre vie ?
DANIEL
(Normalement !)
Oui, je le veux.
LE PRÊTRE
Pierre, voulez-vous ceci répéter après moi, en vous adressant à Daniel :
« C'est étrange, je ne sais pas ce qui m'arrive ce soir. Je te regarde comme pour la
première fois. Je ne sais plus comment te dire. Mais tu es cette belle histoire d'amour
que je ne cesserai jamais de lire »
PIERRE
(répète en rigolant)
LE PRÊTRE
Daniel, voulez-vous répéter ceci après moi, en vous adressant à Pierre :
« Tu es comme le vent qui fait chanter les violons. Et emporte au loin le parfum des
roses. »
DANIEL
(répète en rigolant)
LE PRÊTRE
Pierre, voulez-vous répéter ceci après moi, en vous adressant à Daniel :
« Tu es mon rêve défendu, mon seul tourment et mon unique espérance. Tu es pour moi
la seule musique qui fait danser les étoiles sur les dunes. »
PIERRE
(répète en rigolant)
LE PRÊTRE
(solennel, levant les paumes vers le ciel ; CUPIDON exulte.)
Merveilleux ! Seigneur, nous te remercions pour ce jour de célébration où Daniel et
Pierre s’unissent devant Toi et devant leurs proches. Nous te demandons de bénir leur
mariage, de les aider à rester fidèles à nos promesses et à se soutenir mutuellement
dans les hauts et les bas de la vie.
Cette bénédiction nuptiale étant dûment reçue : Daniel, Pierre, je vous déclare
désormais unis par les liens sacrés du mariage !
(On entend la chanson de Dalida et Alain Delon, Paroles, paroles :
pendant que CUPIDON virevolte partout, heureux.)